Borgia – Interview de Cyril Morin (compositeur de la BO)
Hebdoblog
Borgia c’est la nouvelle série événement diffusée sur Canal+,
Cette série créée par Tom Fontana compte 12 épisodes de 52 minutes, elle revient sur l’époque de Léonard de Vinci et de Michel-Ange, si cette époque était synonyme de créativité, c’est aussi l’époque des » Borgia » et plus particulièrement Rodrigue Borgia qui deviendra l’image de la cruauté en personne, il est évidemment accompagné par sa famille, Jean, l’aîné, un prédateur sexuel, pétri d’orgueil et paresseux ; César, un jeune homme déchiré entre une foi qu’il n’a pas choisie et sa nature sombre et violente ; Lucrèce, une jeune fille découvrant le pouvoir mystérieux de la sexualité féminine ; et Gioffre, un enfant innocent qui grandit au sein d’une famille ravagée par les conflits.
Une série accompagnée d’une musique exceptionnelle que je vous propose de découvrir à travers l’interview de Cyril Morin qui a composé cette bande originale, et des extraits musicaux.
Cyril Morin, comment avez vous composé la musique de Borgia ?
CM– Je suis parti de discussions que nous avons eues avec le showrunner, Tom Fontana. Sur des sons bruts, sur notre vision contemporaine de l’époque (1492), et sur l’idée d’une sortie du Moyen Age pour entrer dans la Renaissance, du son brut vers un début de sophistication.
En quoi la musique peut-elle influer sur la vision que l’on a d’un film ou de la série ici avec Borgia?
CM– Pour les Borgia, la musique peut renforcer le caractère brut des personnages, mais elle peut aussi apporter une touche humaine qui se développe au long des épisodes. j’ai cherché à amener des mélodies plus douces, plus « affectives » pour que l’on s’attache aux personnages.
La musique donne ainsi de la profondeur aux sentiments.
La musique est elle à l’origine de certaines mises en scène de la série (qui s’adapte, la musique ou la série)?
CM– Pour cette série, je me suis adapté à l’image de manière très précise. J’ai été impressionné par la qualité du montage de la série, d’autant que j’ai évidemment eu accès à plusieurs versions avant le montage final de chaque épisode. Mais ce resserrement destiné à renforcer la tension et l’histoire m’a réellement marqué. Et de fait, la musique est peut-être parfois devenue secondaire pour accompagner l’histoire et non pour prendre le pas sur elle, mais cela a été au bénéfice de la série dans son ensemble. A moi de m’adapter…
Sur quels supports vous êtes vous appuyé pour imaginer la musique d’une série comme Borgia?
CM– Au départ sur le script, et sur l’image – parfois erronnée – que je me faisais de l’époque. Tom Fontana avait une vision assez précise de la période telle qu’il la voyait. Mais la musique doit toujours apporter une dimension supplémentaire, et j’ai cherché de nombreuses sonorités différentes avant même de voir des images. J’ai ensuite affiné les choix, mais au final, toutes les étapes de la musique se retrouvent dans la musique.
Comment avez vous réalisé ces différentes musiques?
CM– Avec de nombreux d’ingrédients, une matière vraiment importante : Classique, moderne, des instruments d’époque, de la technologie, des percussions variées et un orchestre à cordes. C’est un mélange qui a mûri longtemps pour prendre cette forme finale.
Comment choisissez vous les instruments utilisés pour la réalisation de ces musiques?
CM– J’ai choisi des instruments et des sons qui pouvaient illustrer l’époque avec une vision actuelle. On raconte une histoire, et il faut que les instruments racontent également cette histoire. J’ai développé une gamme très large entre le Baroque (la viole de gambe, le luth, le cromorne, etc…) et des sons contemporains très avancés, très travaillés. Au final on ne doit retenir que l’impression générale avec des lignes simples, mais si on rentre un peu dans le détail, on constate que l’instrumentation est très riche et très dense.
La musique va t-elle évoluer avec les personnages et l’avancée dans l’histoire?
CM– Justement, le travail a consisté à démarrer de manière assez brute pour rendre les lignes mélodiques et les orchestrations progressivement plus sophistiquées lorsque les Borgia prennent le pouvoir (fin du 4eme épisode). Dans la réalité on part d’une Rome qui est aussi brute et à nue, et qui s’enrichit avec l’arrivée des Borgia.
Avez vous défini des thèmes musicaux différents pour chacun des personnages?
CM– Oui. J’ai essayé mais nous avons dû lutter avec deux facteurs. Le premier était de choisir entre l’action, la situation et le personnage. Qu’est ce qui doit primer ? J’avoue avoir laissé ce choix au montage… Ensuite nous sommes en présence de personnages complexes, souvent doubles et nous arrivons souvent à deux mélodies par personnage. Il était trop difficile de les enfermer dans un seul sentiment. Se posait aussi la question de leur origine : Rodrigo Borgia est d’origine Catalane, d’où le choix de la guitare acoustique et de certains sons bruts qui contiennent un accord vraiment espagnol.
Pourquoi tant d’harmonie et de douceur dans cette musique qui accompagne la violence des Borgia?
CM– Merci d’avoir noté cette douceur et cette harmonie dans cet univers trés brutal ! Comme je le disais, il s’agissait de rendre les personnages « aimables » alors qu’ils ne le sont pas forcément. Cela pour aider à comprendre leurs sentiments et leurs actes, à les accompagner (même dans leurs actions négatives) et surtout à avoir envie de les retrouver pendant 12 épisodes. En cela, la musique a un rôle important, sous-jacent, presque inconscient.
Combien de personnes ont participé à la réalisation de cette production musicale, pendant combien de temps?
CM– Nous étions 4 pendant presque 8 mois. Je m’occupais de la composition, pendant que Arnaud Gauthier et Denis Furne travaillaient sur la production, les feuilles de route et la postproduction musicale, et que Thomas Mercier assurait les mixages. A cela s’ajoutait un orchestrateur, Zack Rya,n et le chef d’orchestre de Budapest, Peter Pejtsik, qui s’est beaucoup impliqué dans ce projet.
La musique est au centre de l’ambiance dans laquelle se plongeront les téléspectateurs, pourtant on est loin d’une musique d’époque, comme relier la modernité de la série et cette atmosphère qui régnait au temps des Borgia?
CM– Comme je l’évoquais à l’instant, il s’agissait aussi de faire un pont entre aujourd’hui et l’époque. Rien ne sert de reconstituer l’époque musicalement. J’ai d’ailleurs volontairement détourné cela. Par contre, notre vision d’aujourd’hui compte beaucoup. De même, aider les spectateurs à revenir vers cette époque de manière naturelle était aussi un but important.
Les musiques sont à la fois mélodiques et à la fois très brutes (avec de nombreux sons ou encore des voix), comment choisissez vous ce qui sera mis en avant?
CM– Selon les scènes, les personnages et les situations… Parfois, une scène prise dans sa globalité a plus d’importance que les personnages qui y participent. Mais dans l’ensemble, la décision finale a été de coller presque au premier degré au déroulement de l’histoire, sans chercher trop de décalage. On est proche de l’action et des sentiments des personnages.
Merci Cyril Morin pour cette interview.
Maintenant place à la musique avec ces extraits de la BO:
CD1
01 GLORIOUS ROME
02 THE AGE OF BORGIA (Rodrigo’s Theme)
03 ALEXANDER VI
04 MY RIGHT EYE
05 CEZARE’S ESCAPE
06 WE CAN DANCE
07 POTION OF LOVE
08 ALL THE DESIRES (Lucrezia’s Theme)
09 INTO THE SISTINE
10 YOU COULD BE POPE (Giulia’s Theme)
11 EXECUTION
12 REIGN SUPREME (Cezare ‘s Theme)
13 LEGITIMATE
14 MORTAL SIN (Juan ‘s Theme)
15 STRATEGIST
16 THE PRICE (Rodrigo and Vanozza)
17 BETROTHAL
18 A NEW VOTE (The Conclave)
19 JUAN AND LUCREZIA (Confession)
20 SENTENCE
21 CUSTODY
22 THE LOVE OF GOD
23 HORSE BACK (Death of a Son)
24 CURIA
25 LUCREZIA AND SFORZA
26 GLORIA
27 WOODEN BOXES
28 A NEW BORGIA
CD2
01 COLOMBA
02 PANGE LINGUA GLORIOSI
03 HERETICAL THOUGHTS
04 SACRED CHOIR
05 DIO MENTIA DE
06 TE DEUM LAUDANUM
07 BANQUET LUTE
08 DIVINE
09 INSIDE (Torments)
10 DECISIONE
11 YOU DON’T BELONG HERE
12 RECEVIMENTO
13 CANTARE
14 MIRACLES
15 SHAHZADEH DJEM
16 RODRIGO’S BED
17 A MOTHER’S HEART
18 MY HUSBAND
19 THE MASKED MAN